« Je m’appelle Émilie, j’ai 21 ans et je fais des études en psychologie. Je souffre de dyslexie* depuis que je suis enfant. Quand j’ai découvert qu’il existait un nom pour ce que je vivais, je me suis sentie tellement soulagée et rassurée.»

Comment ton trouble se manifeste-t-il ?

« J’ai de la difficulté à lire, j’ai vraiment su lire à 9 ans et j’ai été diagnostiquée à 8 ans. Je dois relire plusieurs fois une phrase parce que je ne la comprends pas forcément du premier coup donc la lecture me demande beaucoup d’effort. Par exemple, je prends beaucoup de temps à retrouver un mot spécifique dans une phrase et j’ai de la difficulté à faire la différence entre certains sons en anglais donc j’ai de la peine à apprendre de nouvelles langues. »

Comment vis-tu tes études à l’Université avec ton trouble ?

« L’Université est un endroit pour étudier et non pour se prendre la tête. Il y a beaucoup d’administratif à faire afin de recevoir des aides de la part de l’Université, les délais et les règles ne sont pas les mêmes en fonction de la faculté. Par exemple, quand j’ai changé de faculté, ma faculté actuelle m’a demandé une attestation plus détaillée de ma dyslexie mais j’avais seulement 4 semaines pour leur en donner une. En vérité j’ai seulement eu 2 semaines car ils ont eu des problèmes avec le transfert de mon dossier d’une faculté à une autre et également avec ma taxe d’inscription. J’ai pris contact avec ma logopédiste mais elle était en vacances et le temps qu’elle rentre et que je fasse les différents tests, les délais pour envoyer l’attestation étaient dépassés. L’Université ne voulait pas prendre en considération mon attestation pour ce semestre mais pour le suivant, cependant j’avais des examens en janvier et je ne trouvais pas cela juste de ne pas avoir le temps supplémentaire auquel j’ai le droit. L’Université m’a demandé 200.- chfs en raison d’inscription tardive afin de faire valoir mon attestation pour ce semestre. Cependant, j’ai refusé de payer cette somme car j’estimais ne pas être en faute. J’ai donc fait recours et l’Université a été correcte et a fini par me donner raison et depuis décembre mon attestation est valide. Néanmoins, j’ai fait un contrôle continu en novembre sans temps supplémentaire ce qui m’a péjoré car j’ai eu 2.75. Toute cette histoire avec l’administration ça m’a occupé environ 3-4 heures par semaine, c’est comme si j’avais pris un cours supplémentaire. »

De quels aménagements bénéficies-tu lors des examens/cours ?

« J’ai le droit à un temps supplémentaire lors des examens et j’ai un ordinateur qui corrige les fautes d’orthographe dans mon texte. »

Quels aménagements aimerais-tu avoir à l’Université ?

« Les aménagements ne sont pas les mêmes suivant la faculté, par exemple dans mon ancienne faculté j’avais le droit à un dictionnaire électronique où je pouvais lire la définition d’un mot que je ne comprenais pas dans la consigne ou regarder comment il s’écrivait. J’aimerais bien y avoir accès à nouveau. Je souhaiterais également que le·la professeur·e puisse reformuler les questions dans les examens car parfois je ne comprends pas un mot et je ne peux donc pas réaliser l’exercice. Ils·elles ne le font pas parce qu’ ils·elles craignent de communiquer des informations sans le vouloir donc ils·elles pourraient par exemple préparer à l’avance une reformulation de question. J’aimerais aussi davantage de souplesse de la part de l’administration en accordant des délais plus longs. Par exemple, 8 semaines car 4 semaines c’est trop court pour trouver un·e spécialiste disponible et faire le reste des démarches nécessaires. Pour finir, je souhaiterais que les professeur·e·s soient davantage sensibilisé·e·s à la question de la dyslexie. Si l’Université veut inclure tout le monde, il est nécessaire que tout le monde fournisse des efforts. »

Est-ce que tu t’es déjà sentie exclue dû à ton trouble ?

« Non mais j’ai le sentiment d’être toute seule là-dedans. Personne ne sait les informations, tu ne sais pas à qui demander si tu as une question et tu ne sais même pas ce qu’il existe. »

As-tu subi des discriminations dû à ton trouble ?

« Quand j’avais 7 ans, j’ai eu une professeure qui pensait que j’avais un manque de volonté ou que je voulais attirer l’attention car je n’arrivais pas à lire. Plus tard, au gymnase, certaines personnes de ma classe riaient quand je devais lire à l’oral et une professeure m’a proposé d’arrêter de lire à voix haute mais j’ai refusé. »

*Définition de la dyslexie

« La dyslexie est un trouble du langage écrit caractérisé par une difficulté persistante d’apprentissage et de pratique de la lecture, en dépit d’une intelligence normale voire supérieure. C’est aussi une façon différente de traiter l’information. Les dernières recherches en neurosciences prouvent qu’il s’agit d’un trouble neurodéveloppemental d’origine multifactorielle. »

Source : https://www.adsr.ch/dyslexie